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Visites à Bến Tre & Đồng Tháp

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En ce jour d’été, nous nous sommes mis en route de bon matin pour  le village de Thành An (district de Mỏ Cày Bắc, province de Bến Tre). Au sortir de la ville, dans la lumière du jour, une légère brume enveloppait encore les champs verdoyants, des deux côtés de l’autoroute menant vers les plaines des fleuves Tiền et Hậu.

Nous sommes arrivés dès 9 h à la maison communale du village, où nous attendaient vingt familles de paysans. Nous avons été accueillis par la présidente et la vice-présidente de l’antenne locale de l'Union des femmes, interlocutrices sur place de l’AVNES, ainsi que par quelques membres du Comité populaire du village (équivalent du conseil municipal en France).

Pour ne pas retenir trop longtemps toutes les personnes présentes, nous avons rapidement exposé le but de notre visite et revu une dernière fois la liste des vingt ménages proposés par l'Union des femmes pour le programme de micro-crédit. Ces prêts d’une petite somme, à faible taux d’intérêt, visent à procurer aux paysans pauvres les capitaux nécessaires pour démarrer une activité professionnelle, par exemple un élevage ou une culture commerciale.

Sur les 20 familles de cette nouvelle tranche du programme, dix étaient considérées comme “pauvres” avec un revenu maximum de 400 000 dong (moins de 14 euros) par personne par mois, et les dix autres comme “proches de la pauvreté” avec entre 401 et 520 000 dong (entre 14 et 18 euros). Jusqu’alors, ces personnes subsistaient en louant leurs services à qui en avait besoin, ou bien étaient sans travail à cause d’un handicap. Toutes ont choisi de se lancer dans l’élevage - porcin pour 16 d’entre elles et bovin pour les quatre restantes.

Derrière ces chiffres abstraits, se trouvent de vrais hommes et femmes de la campagne, peu loquaces et réservés, dont seuls les regards trahissent les pensées. Après quelques hésitations, une mère de famille quinquagénaire a avoué son analphabétisme, aussi avons-nous dû lui demander de faire une croix en lieu et place de la signature sur le document attestant de la réception des fonds. Pour mettre l’assistance à l’aise mais aussi en guise d’encouragement, nous avons, en quelques mots, souhaité à chaque emprunteur de réussir dans sa nouvelle entreprise. Puis nous avons remis à chacun le modeste capital de 6 millions de dong (environ 200 euros) réunis grâce à l’aide de nos amis au Canada, en Suisse et en France.


Signature pour la réception des fonds


Remise de micro-crédit

Les yeux brillants d’émotion, les bénéficiaires nous ont remerciés, brièvement mais avec la sincérité propre aux gens de la campagne. Auparavant, Mme Thắm, de l'Union des femmes, n’a pas manqué de rappeler qu’à Thành An, il restait beaucoup de familles démunies à aider. Les participants à la deuxième tranche du programme de micro-crédit, présents ce jour-là, étaient considérés comme prioritaires en raison de leur situation particulièrement précaire. Mme Thắm a également souligné la modicité des taux d’intérêts, équivalents à ceux applicables aux prêts subventionnés par l’Etat et moitié moindres que ceux du marché. Au nom de l'Union des femmes, elle a exprimé l’espoir qu’avec la somme de 6 millions de dong, qualifiée de “modeste” par les représentants de l’AVNES mais représentant en réalité une somme considérable en zone rurale, les paysans pourraient se mettre au travail. Il leur faudrait, a-t-elle insisté, utiliser à bon escient ce capital “non négligeable”, de manière à le rembourser dans deux ans, une fois leur situation améliorée, et à permettre à d’autres familles en grande difficulté d’en bénéficier à leur tour.

La journée de rencontre et de remise des micro-crédits s’est ainsi déroulée sans heurts. Une fois les papiers signés et les fonds reçus, les participants sont partis les uns après autres. Nous avons voulu prendre une photo souvenir avec quelques uns. Après s’être un peu fait prier parce qu’ils ne s’estimaient pas assez bien habillés pour cela, ils ont fini par accepter de bonne grâce de poser avec nous.

Avant que nous ne quittions Thành An, les villageois voulaient absolument nous offrir du jus de canne à sucre fraîchement pressée. Ils ont même invité toute la délégation de l’AVNES à un repas organisé pour l’anniversaire de la mort de quelqu’un au village. A notre grand regret, nous avons dû refuser car il était temps de nous rendre à Mỹ Long, dans la province de Đồng Tháp, pour inspecter des systèmes de production de biogaz et rencontrer les bénéficiaires du programme de micro-crédit de l’AVNES de l’année dernière.

Nous avons quitté Thành An en empruntant l’étroite route où ne peut passer qu’un seul véhicule, avant d’atteindre la route départementale. Après avoir franchi de nouveau le pont Rach Miễu, nous voici revenus à Tiền Giang, sur le chemin de Đồng Tháp. Au bout d’une heure, nous sommes arrivés au village de Mỹ Long. Mmes Thu Hà et Bé Tám, de l'Union des femmes, nous ont tout de suite emmenés déjeuner dans une gargote.

Après le repas, nous sommes allés au siège du Comité populaire,  où nous attendait une armada de motos taxis prêtes à nous emmener visiter les familles du Hameau 2 rattaché au village.

Le Hameau 2 ne fait pas partie de la “campagne profonde” comme le Hameau 4, mais par manque de temps - nous devions en une demi-journée à la fois inspecter les réseaux de biogaz et rendre visite aux bénéficiaires du programme micro-crédit - nous ne pouvions pas trop nous éloigner du village.

Nous nous sommes tout d’abord rendus chez Mme Nhiên et M. Khang. Selon ce dernier, leur lopin de terre de moins de 1000 mètres carrés était trop petit pour subvenir aux besoins de la famille, surtout au regard du désir des parents de voir leurs enfants faire des études. M. Khang s’est fait une joie de nous faire visiter la porcherie. Sur les quatre cochonnets achetés grâce à un prêt octroyé par l’AVNES au début de l’année dernière, deux ont été élevés pour la viande et, quand ils ont atteint un poids d’environ un quintal, M. Khang et son épouse les ont vendus. Le couple n’a gardé que les deux femelles élevées pour la reproduction et il a pu ainsi élever 14 autres cochonnets depuis. Ces dernières années, les prix de la viande de porc sont élevés, aussi 100 kilos de bêtes sur pied (vivantes, avant abattage) rapporteraient jusqu’à 6 millions de dong. Outre des cochons, la famille élève également des poissons et des grenouilles. M. Khang nous a emmenés à l’étang de pisciculture, une pièce d’eau guère plus grande qu’une piscine municipale de province en Europe, mais grouillante de poissons-chats géants et de tilapias, ainsi que de grenouilles de toutes tailles. Il nous a annoncé avec fierté que leur fille aînée, frais émoulue de l'Institut universitaire des sciences économiques à Cần Thơ, venait de trouver du travail la veille, et que la cadette était train de préparer son dossier pour entrer à l’Institut universitaire de gestion de Cao Lãnh. Il ne leur restait plus que les deux plus jeunes à s’en occuper. Mme Nhiên a alors pris la parole pour remercier les bienfaiteurs qui avaient accordé un micro-crédit à la famille alors qu’elle en avait désespérément besoin. Son mari et elle, a-t-elle confié, s’étaient efforcés d’utiliser au mieux les cinq millions de dong empruntés, de manière à dégager des bénéfices suffisants pour permettre à la famille de surmonter ses difficultés et d’assurer l’avenir des enfants.


Porcherie de Mme Nhiên & M. Khang


Leur étang de pisciculture

Nous avons alors quitté Mme Nhiên et M. Khang pour visiter deux maisons équipées d’un système de production de biogaz dont AVNES a subventionné l’installation. Nous enfourchons de nouveau les motos taxis, qui filaient sur les chemins de campagne à peine assez larges pour une moto Honda (c’est étonnant que personne ne soit encore tombé dans le fossé). De nouveau, nous allons à la rencontre de paysans simples et sincères, nous les entendons remercier avec naturel et exprimer l’espoir de voir d’autres familles recevoir le genre d’aide dont ils avaient eux-mêmes bénéficié. Il était déjà presque 16h et nous avions encore un long trajet à faire sur les routes départementales et nationales. C’est ainsi que nous avons dû conclure notre programme de visites, en disant au revoir aux villageois, et à Mmes Thu Ha et Be Tam de l'Union des femmes du village de My Long. Ces dames n’ont pas oublié de nous offrir un sac rempli de grosses mangues locales.

Sur le chemin de retour, nous étions plus silencieux qu’à l’aller, sans doute à cause de la fatigue. Mais je me souviendrais toujours de ces mots prononcés tout haut par notre ami Lễ : “Six millions de dong, c’est juste assez pour passer la soirée au bar pour certains. Mais cela permet aussi de “changer la vie“ de bien d’autres personnes”.

Juillet, 2011
Minh Giang.

Photos : Nguyển Duy Lễ & Nguyễn Văn Gia.
Traduction : Phan Ngc Dung.
Titre original : "Về thăm Bến Tre & Đồng Tháp".